(1832-1914)
« En canonisant la Bienheureuse Rafqa Choboq Ar-Rayès, l'Eglise met en lumière d'une manière toute particulière le mystère de l'amour donné et accueilli pour la gloire de Dieu et le salut du monde. Cette moniale de l'Ordre libanais maronite désirait aimer et donner sa vie pour ses frères. Dans les souffrances qui n'ont cessé de la tourmenter durant les vingt-neuf dernières années de son existence, sainte Rafqa a toujours manifesté un amour généreux et passionné pour le salut de ses frères, puisant dans son union au Christ, mort sur la croix, la force d'accepter volontairement et d'aimer la souffrance, authentique voie de sainteté. Puisse sainte Rafqa veiller sur ceux qui connaissent la souffrance, en particulier sur les peuples du Moyen-Orient affrontés à la spirale destructrice et stérile de la violence! Par son intercession, demandons au Seigneur d'ouvrir les cœurs à la recherche patiente de nouvelles voies pour la paix, hâtant les jours de la réconciliation et de la concorde! » (Extrait de l’homélie du Pape Jean Paul II à l’occasion de la canonisation de Sainte Rafqa, le dimanche 10 juin 2001).
- Rafqa à Himlaya (1832-1859)
Rafqa vit le jour le 29 Juin 1832 à Himlaya, village du Meten-Nord près de Bikfaya (Liban). Elle était fille unique de Mourad Saber al-Choboq al-Rayès et de Rafqa Gemayel. Elle fut baptisée le 7 Juillet 1832 et reçut le prénom de Boutrossieh (Pierrette). Ses Parents l'ont élevée dans l'amour de Dieu et l'assiduité à la prière.
Sa mère mourut en 1839 alors que Rafqa n'avait que sept ans. Ce fut pour elle une grande peine. Son père connut la misère et la nécessité. Il décida alors, en 1843, de l'envoyer à Damas pour travailer chez M. Asaad al-Badawi, d'origine libanaise. Elle y resta quatre ans. Rafqa revint à sa maison en 1847 et trouva son père remarié. Rafqa était belle, de bon caractère et d'une humble piété. Sa tante maternelle voulait la marier à son fils et sa marâtre à son frère. Alors que le conflit entre les deux femmes grandissait, Rafqa, à l'écart de ces querelles, cultivait le désir d'embrasser la vie religieuse.
- Rafqa dans la Congrégation des Mariamettes (1859-1871)
Rafqa demanda à Dieu de l'aider à réaliser son désir. L'idée lui vint d'aller au couvent Notre-Dame de la Délivrance à Bikfaya pour se joindre aux Mariamettes, fondées par le Père Joseph Gemayel. En entrant à l'église du couvent, elle sentit une joie intérieure indescriptible. Alors qu'elle priait devant l'icône de Notre-Dame de la Délivrance, elle entendit une voix qui lui dit: "Tu seras religieuse".
La mère supérieure admit Rafqa sans l'interroger. En connaissant cette nouvelle, son père vint, avec sa femme, pour la ramener à la maison. Rafqa refusa de les rencontrer. Après la période de postulat, Rafqa reçut l'habit de novice en la fête de Saint Joseph, le 19 mars 1861. L'année suivante à la même date, elle prononça ses vœux temporaires. La nouvelle professe fut envoyée au Séminaire de Ghazir où elle fut chargée de la cuisine. Parmi les séminaristes se trouvaient le Patriarche Élias Houayek et l'Évêque Boutros al-Zoghbi. Durant son séjour à Ghazir, elle profitait de ses moments libres pour approfondir ses connaissances de la langue Arabe, de la calligraphie et du calcul.
En 1860, Rafqa fut transférée à Deir al-Qamar pour enseigner le catéchisme aux jeunes filles. Elle assista durant cette même année aux événements sanglants survenus au Liban. Il lui arriva de sauver la vie d'un petit enfant qu'elle cacha dans sa robe. Rafqa passa environ un an à Deir al-Qamar puis revint à Ghazir.
En 1863, Rafqa rejoignit une école de sa congrégation à Jbeil pour instruire des jeunes filles et les former aux principes de la foi chrétienne. Un an après, elle fut transférée à Maad, sous la demande de M. Antoun Issa. Elle y passa sept ans, durant lesquels elle fonda une école pour l'éducation des jeunes filles.
- Rafqa dans l'Ordre Libanais Maronite (1871-1914)
1. Au monastère Mar Semaan al-Qarn, Alto (1871-1897)
Au cours de son séjour à Maad, vers 1871, une crise secoua la Congrégation des Mariamettes qui fut aussitôt dissoute. Ce fait troubla Rafqa. Elle entra à l'église Saint Georges pour prier le Seigneur et Lui demander de lui montrer la bonne voie. Elle entendit une voix disant: "Tu resteras religieuse".
Le soir même de sa prière, Rafqa rêva et vit en songe trois Saints: Saint Georges, Saint Siméon le Stylite et Saint Antoine le Grand, Père des moines, qui lui dit à deux reprises: "Entre dans l'Ordre Libanais Maronite". M. Antoun Issa lui facilita le transfert de Maad au monastère de Mar Sémaan al-Qarn à Aito (Liban-Nord), où elle fut immédiatement acceptée. Le 12 Juillet 1871, elle reçut l'habit de novice et le prénom de sa mère Rafqa. Elle fit sa profession solennelle le 25 août 1872.
Elle passa 26 ans au monastère Mar Sémaan al-Qam, Aito. Elle était un exemple vivant pour les moniales par son observation des Règles.
Le premier dimanche d'octobre 1885, en la fête de Notre Dame du Rosaire, Rafqa entra à l'église du monastère et se mit à prier, demandant au Seigneur de la faire participer à sa Passion Rédemptrice. Sa prière fut immédiatement exaucée. Le soir, avant de dormir, elle sentit un mal insupportable à la tête qui, par la suite, atteignit ses yeux.
Tous les soins utilisés étaient sans résultats. On consulta un médecin américain qui décida d'opérer Rafqa dans l'immédiat. Elle refusa l'anesthésie durant l'opération, au cours de laquelle le médecin lui arracha accidentellement son œil qui tomba par terre en palpitant. Rafqa ne se plaignit pas et lui dit:
"Pour la Passion du Christ. Que Dieu bénisse tes mains et te récompense". Puis le mal ne tarda pas à passer à l'œil gauche.
2. Rafqa dans le monastère Saint Joseph al-Dahr Jrabta (1897-1914)
L'Ordre Libanais Maronite décida de fonder le monastère de Saint Joseph al-Dahr à Jrabta-Batroun en 1897. Six moniales furent transférées du monastère Saint Simon al-Qarn au nouveau monastère Saint Joseph à Jrabta. Parmi elles, figurait Sainte Rafqa, car les sœurs étaient très attachées à elle et espéraient la prospérité de leur monastère grâce à ses prières. Mère Ursula Doumit, originaire de Maad, fut nommée Supérieure.
En 1899, Rafqa devint complètement aveugle puis paralysée. Ses articulations se disloquèrent, son corps devint aride et sec: un squelette peu à peu décharné. Elle passa les sept dernières années de sa vie étendue seulement sur le côté droit de son corps. Sur son visage rayonnant et paisible, se lisait un sourire céleste.
Selon le jugement des médecins, Rafqa était atteinte d'une tuberculose ostéo-articulaire.
Rafqa vécut 82 ans, dont 29 dans les souffrances qu'elle supportait avec joie, patience et prière pour l'amour du Christ.
Le 23 mars 1914, Rafqa demanda la Sainte Communion puis remit son esprit en appelant Jésus, la Vierge Marie et Saint Joseph.
Enterrée au cimetière du monastère Saint Joseph-Jrabta, une lumière splendide apparut sur son tombeau pour deux nuits consécutives. Par l'intercession de Sainte Rafqa, Notre Seigneur a fait beaucoup de miracles et a accordé largement ses grâces.
Le 10 juillet 1927, la dépouille de Rafqa fut transférée dans un nouveau tombeau, dans l'église du monastère. La cause de sa Béatification a été soumise au Vatican le 23 décembre 1925.
Sa Sainteté le Pape Jean-Paul II déclara Rafqa : Vénérable le 11 février 1982; Bienheureuse le 17 novembre 1985; un modèle à suivre dans la dévotion au Saint Sacrement pour le Jubilé 2000 ; une sainte le dimanche 10 juin 2001.
- Prière :
Oh Jésus Christ, notre Dieu et Seigneur, vous avez imprimé votre image de salut dans la vie de Sainte Rafqa, et fait d’elle maîtresse et ouvrière, en priant et partageant avec vous le Mystère de Rédemption.
Nous nous humilions devant vous, avec ses prières et intercession, afin que vous bénissez les enfants, éclairiez la jeunesse, et transformiez la fatigue des gens en saisons de grâce et de bonté, et donniez aux malades et à ceux qui souffrent, les grâces de guérison, la joie et le bonheur, et accordiez ceux qui prient pour vous dans les églises et les monastères, ce qu’ils demandent.
Et comme vous avez honoré Rafqa pour voir vos lumières célestes, permettez-nous de vivre comme elle dans la foi et l’espoir, et d’aimer durant toute notre vie, pour vous glorifier et vous remercier avec elle et avec la Vierge Marie et tous les Saints jusqu’à la fin des temps.
Amen.